mardi 17 mai 2011

L'Agora Romaine d'Athènes

Les photos et les illustrations sont de moi, vous pouvez en disposer comme vous le voulez. 
Le forum romain d'Athènes est un édifice de 111 X 98m avec un large espace rectangulaire entouré de stoas (portiques) de boutiques et de garde-mangers. Il avait deux propylées (portes monumentales), celui de l'ouest, connu sous le nom de Porte d'Athéna Archegète (la Fondatrice), porte dédiée par le dème d'Athènes aux environs de 10/11 av. JC est d'ordre dorique. L'autre porte a des colonnes d'ordre ionique en marbre hymétien et pentélique. Le pavement a été effectué sous le règne d'Hadrien (117-138).
L'agora romaine aurait été détruite lors du raid des Heruliens en 276. L'endroit, au fil du temps a été recouvert de sable et de terre, et aux périodes byzantines et post-byzantines des habitations se sont installées sur les lieux, ainsi que des boutiques et des églises. 

Les restes d'un édifice longtemps appelé "Agoranomeion" sont visibles mais son identification actuelle n'admet plus cette dénomination. Il est situé au sommet d'une large volée de marches, est surmonté de trois arcades et l'inscription sur l'épistyle le dédie à Athéna Archegete et au Divin Auguste.
L'un des édifices les plus importants du forum est l'Horologion de Kyrrhestos ou Tour des Vents. Cette tour a été construite par l'astronome Andronikos de Kyrrhos en Macédoine. C'est une tour octogonale en marbre pentélique qui repose sur une base de trois marches. Elle avait une couverture conique, une annexe cylindrique au sud et deux propylées.
Horologion (restitution)
Une girouette en bronze ornée d'un triton (aujourd'hui disparue) surmontait l'édifice et indiquait les directions des vents dont les personnifications sont sculptées sur les parois. Leurs noms sont inscrits au sommet de la corniche.

Les rayons d'un cadran solaire sous chaque personnage permettent de donner les heures, et à l'intérieur de l'édifice se trouvait une clepsydre qui était actionnée par de source d'eau descendant de l'Acropole. A l'époque paléochrétienne, le monument a été utilisé comme chapelle et devint un monastère derviche au XVIIIème siècle.     

mardi 19 avril 2011

La Maison Carrée de Nîmes.

Les photos sont une nouvelle fois, d'Hélène, merci de vous adresser à elle pour les utiliser ;)
Dans toutes les cités de l'Empire, la parure urbaine est le résultat de l'évergétisme : il s'agit pour les notables, de faire profiter la collectivité de leurs richesses ; le premier évergète de l'Empire étant l'Empereur.
La Maison Carrée est dédicacée aux consuls Lucius et Caius Caesar, fils et petit fils adoptifs d'Auguste. Edifiés sur le forum, les temples en général sont dédiés au culte impérial et destinés à une divinité. C'est un édifice d'un sanctuaire fermé par un mur de péribole avec une aire sacrée offerte à une divinité qui rappelle la puissance impériale. Le temple abrite la statue de la divinité dans une cella; les temples romains sont toujours construits sur des podiums ils dominaient le forum. La Maison Carrée de Nîmes, faisait face à la curie.
Le temple, inspiré du temple d'Apollon à Rome, mesure 27 X 15 X 17 m ; il est composé de 30 colonnes ornées de chapiteaux corinthiens décorés de feuilles d'acanthe.
Les romains considèrent l'architecture et l'apparence d'une cité comme un miroir du pouvoir de l'Empire, c'est pour eux une vitrine de la civilisation, ils exportent partout un savoir-faire et une technique. Influencés par l'art hellénistique, ils adaptent les caractéristiques de cet art.

Les romains ont importé les ordres grecs mais chez eux, la colonne a un usage décoratif, elle contribue au jeu d'ombres et de lumières, crée du relief, du rythme mais chez les romains c'est une architecture de façade.  

A la chute de l'Empire, l'édifice a été utilisé tout au long de l'histoire. D'abord comme salle de délibération puis comme chapelle au XVIème siècle. A la Révolution, elle sert de préfécture puis devient salle d'archivage. Au milieu du XIXème siècle, la Maison Carrée devient un musée. Son utilisation ininterrompue, est peut-être ce qui a permis sa conservation.

vendredi 1 avril 2011

Hokusai

Hokusai. Une Carpe
Estampe. 35,7 X 16,3 cm
Conservée au Musée Guimet (Paris)
Les estampes aux sujets profanes qui apparaissent au XVIIème siècle sont une véritable révolution dans l'art japonais et permettent leur diffusion dans le monde occidental. Elles sont imprimées en grand nombre grâce à la xylogravure (sur bois). Cet art se développe pour de nombreuses raisons; il est l'expression de l'émergence d'une classe de marchands toujours plus influente et d'une population urbaine croissante; ces 2 classes sociales avaient peu de connaissances en matière d'art classique mais commencaient à jouer un rôle essentiel dans la société. Elles trouvent dans cet art aux sujets du quotidien, un moyen de s'exprimer et de valoriser leurs activités. Les premières estampes en noir et blanc remontent au XVIIème siècle et deviennent rapidement polychromes grâce à l'application successive de planches de bois sur lesquelles on a appliqué la couleur et que l'on pose une par une sur la feuille.
C'est un genre qui a longtemps été sous-estimé puisque considéré comme l'expression de la culture populaire contrastant avec la culture de la cour et des samouraïs. A son origine, l'estampe est considérée comme une forme d'artisanat fonctionnel servant par exemple à faire des affiches pour les représentations théâtrales. Ce genre graphique n'a trouvé son espace culturel au japon qu'au début du XXème siècle. Certaines de ces affiches influencent très rapidement les artistes occidentaux qui découvrent la valeur artistique de ces estampes.
La papier sur lequel se font les estampes est obtenu à partir de la plante du mûrier. Les gravures sur bois sont obtenues à partir de teintures végétales, on rajoute parfois des teintures au mica ou des pigments métaliques pour produire des effets particuliers.
Si les premières estampes ont des motifs religieux, très rapidement, la facilité de leur fabrication et la modestie de leur prix en permettent la diffusion et la variété des motifs qui y sont représentés : aventures sentimentales, acteurs en vogue, chroniques de la vie quotidienne ou créatures des "quartiers sans nuit"... Ces estampes acquièrent leur véritable lettres de noblesse et sont un choc culturel en occident. Le japonisme se diffuse comme une véritable mode. Les peintres et graveurs découvrent des propositions originales de couleurs, disposition, mise en page et perspectives qui vont bouleverser le paysage visuel notamment auprès des impressionnistes et de Claude Monet dont la collection personnelle comptait plus de 250 estampes. Van Gogh quant à lui possédait plus de 400 estampes.
Van Gogh. Le Pont sous la Couleur de Pluie
Conservé au Van Gogh Museum (Amsterdam)

mercredi 23 mars 2011

Le trésor de Notre-Dame de Reims

Le manteau du sacre de Charles X
Ce manteau est en soie et velours brodés de fleurs de lys de fils d'or et d'argent, il est doublé et orné d'hermine.
Copie de la couronne du sacre de Louis XV
Reliquaire de la Sainte Ampoule
Talisman de Charlemagne
Il s'agit d'un reliquaire en forme d'ampoule en or repoussé, incrusté de pierres précieuses daté des environ de 800, conservé dans le trésor de la cathédrale Notre-Dame de Reims.
L'époque carolingienne connait une grande création en matière d'orfèvrerie. Les matériaux se chargent des vertus et significations supérieures à la matière elle-même. Ainsi l'or brille de tout son éclat dans la liturgie, en l'honneur de dieu mais aussi au service du souverain. L'or en effet, est une offrande au dieu, il est également l'équivalent de la lumière divine et reflète la majesté terrestre qui en dérive. Sous Charlemagne, les églises sont dotées de nombreux objets qui traduisent la munificence princière : châsses, ciboires... La conviction qui anime cette période est que la gloire de dieu ne peut être mieux célebrée que par l'orfèvrerie et les pierres précieuses. Charlemagne est immensément riche, notamment grâce à son butin de guerre contre les Avars, il fait des dons considérables en métal précieux travaillé aux églises, cathédrales...
Le talisman dit "de Charlemagne" est censé avoir été pris au tombeau de l'empereur par Otton III puis conservé dans la cathédrale d'Aix la Chapelle d'où il a été rapporté à Reims en 1804 par Napoléon. Il s'agit d'un reliquaire pectoral relié par une chaine appartenant au genre des ampoules de pélerins orientales. La relique était enchâssé parmi des pierres, saphirs et émeraudes. La monture renferme deux cabochons transparents.

lundi 21 mars 2011

La cathédrale Notre-Dame de Reims

Les photos sont de moi, vous pouvez en disposer comme il vous plait ;)

La cathédrale Notre-Dame de Reims
Façade ouest de la cathédrale
Le terme "gothique" apparait chez les humanistes italiens de la Renaissance dès la fin du XVème siècle et notamment chez Vasari. En effet, architecturalement, l'Europe du Nord est encore au Moyen-âge alors que l'Italie est entrée dans la Renaissance. Le regard des italiens, sur cet architecture qu'ils considèrent comme "barbare" est péjoratif. Ils la considèrent comme mal dégrossie, faite de formes irrégulières. Ce terme perdurera jusqu'au XIXème siècle, période des nationalismes durant laquelle le "gothique" acquiert ses lettres de noblesse puisqu'il répond à des spécificités identitaires. De nos jours, le regard est plus nuancé et témoigne plus d'un état d'esprit que d'une forme géomêtrique qui répond à une sensibilité religieuse et à un dialogue entre les supports (architecture, sculpture, orfèvrerie...)

L'art médiéval n'est jamais gratuit, il a une nécessité et est réalisé sur commande par les rois, princes, ecclésiastiques, les corporations... Les commaditaires ont des motivations différentes qui se reflêtent dans les oeuvres, elles sont politiques, religieuses, familiales, démagogiques... Ces motivations reflètent les préoccupations et les contextes qui influencent le gothique.
La cathédrale Notre-Dame de Reims est conçue dans un contexte de bouleversements poltiques et économiques qui influencent l'architecture religieuse au XIIème siècle. C'est l'époque du renforcement de l'autorité du roi avec les règnes de Louis VI et Louis VII. Le royaume de France s'agrandit et les richesses s'accroissent.
Le chantier gothique de Reims est lancé en 1211 dans la cathédrale du sacre des rois de France, il représente un parti important pour les souverains capétiens. C'est un chantier royal qui surpasse tous les chantiers précédents.
L'édifice fait 150m de long, la hauteur sous voûte est de 38m. Son architecture est influencée par le chantier révolutionnaire de la cathédrale de Chartres. Les architectes cherchent à unifier le bâtiment, à rendre l'élévation harmonieuse, notamment par les piles cantonnées. On cherche à raisonner autour du chapiteau.

Nef de la cathédrale
Chapiteau et fenêtre-châssis
Reims est un grand chantier d'innovation. En effet, jusque là, on montait les murs des édifices d'une traite; ici on construit les supports et les murs et on laisse un espace vide; on monte ensuite les pierres de la fenêtre puis on place la maçonnerie qui est autonome du mur. Ces nouvelles techniques traduisent l'audace et la maitrise des architectes. Cette innovation permet le développement de l'architecture rayonnante. A partir du chantier de Reims, les fenêtres occupent toute la largeur des travées et de plus hautes fenêtres peuvent être installées.
Travée et fenêtre-châssis
La sculpure représente également un élément d'une grande importance. Elles sont élaborées à différentes phases entre 1225 et 1265.
Sculptures et vitraux au revers de la façade ouest
Le revers de la façade est entièrement orné de sculptures et de vitraux représentant les Prophètes de l'Ancien Testament, des scènes de l'Annonciation, de la Rencontre d'Anne et de Joachim à la Porte Dorée, l'histoire de St Jean Baptiste...
Dans la moitié du 12ème siècle, la sculpture en général montre des signes d'observation de la réalité, on tente de la transcrire dans la pierre. La figure humaine connait également un nouveau traitement avec une observation de plus en plus poussée et une volonté de transcrire les expressions. On tente de varier les attitudes, la forme des vêtements, les figures sont détachées des supports, avec une plus grande liberté de mouvement.
Les sculptures de ce siècle présentent une caractéristique appelée Muldenfalstenstil ou Style 1200, c'est un style de transition entre l'art roman et l'art gothique qui offre des repères de la préoccupation des artistes de l'époque : la recherche de réalisme et une tendance antiquisante dans la façon de traiter les drapés.

Ange au Sourire
La cathédrale de Reims représente le chantier type du gothique classique avec l'affirmation du pouvoir royal, le renouveau spirituel qui touche tous les supports, l'apparition d'un nouveau langage architectural et d'une nouvelle vision sculptée. On assiste à un glissement de l'artiste vers la créature qui se traduit par l'humanisation des figures sacrées. On assiste à une nouvelle ferveur vis à vis de la Vierge et de son caractère d'intercesseur vis à vis de Dieu et du Christ.





lundi 14 mars 2011

Le tympan du portail du Prieuré St Fortunat de Charlieu (42)

Les photos proviennent de la collection privée d'Hélène,  http://tatalelene.blogspot.com/ que je félicite pour ses bien belles photos ma foi ;) Merci de la contacter si vous souhaitez utiliser ces photos.
L'abbaye de St Fortunat est une abbaye rattachée à l'ordre clunisien. Elle avait été fondée au VIIIème siècle par des moines venus de Touraine. Une importante communauté se développe au Xème siècle atour de l'édifice et un bourg se forme qui se place sous la protection du monastère. 
Il ne subsiste que le narthex de cette église romane du XIIème siècle qui remplaçait un édifice plus ancien fondé au IXème siècle. La qualité du décor sculpté nous permet d'imaginer la richesse de la statuaire de l'ensemble de l'édifice.
Le portail occidental à l'intérieur du narthex ouvre sur un espace vide que l'imagination peut reconstruire. Quatre arcades en plein cintre faites de simples claveaux forment une couronne solaire autour d'un tympan extrèmement simple dont les visages ont été martelés par des iconoclastes en 1793. Deux des voussures s'appuyent sur des colonnes à chapiteaux ornés de motifs végétaux.
Chapiteaux ornés de végétaux
Linteau présentant les Douze Apôtres

Grand Tympan
Le linteau montre les Douze Apôtres mutilés assis chacun sous une arcature en plein cintre. Au dessus, le Chist en gloire bénissant, tient le Livre de Vie dans la main gauche. La mandorle est maintenue par deux grands anges qui l'entrainent vers les cieux. Ils déploient leurs ailes dans l'espace disponible du tympan, leur visage de profil regardant le Christ.
Christ en gloire
C'est une représentation classique de l'Ascencion, mâtinée de la figure du Christ Juge des Temps.
Curieusement, deux portails côte à côte et d'inégale grandeur, occupent le côté nord du narthex dans une disposition unique. La statuaire est particulièrement remarquable et témoigne de l'activité d'un artiste de forte personnalité maitrisant parfaitement son art.
Le grand portail mêle plusieurs thèmes de l'iconographie chrétienne médiévale. Celui de l'Ascension identifiable avec la présene des Douze Apôtres, formant le collège apostolique, témoin du mystère en train de s'accomplir. Cependant, ici s'y ajoute la présence de la Vierge escortée de deux anges en position centrale. Mais, alors que les personnages sont habituellement présentés debout, y compris le Christ, indiquant que l'évènement a lieu ici et maintenant, le sculpteur les montre assis aux pieds d'un Christ pantocrator installé dans une mandorle perlée dans une disposition qui évoque son statut de Juge de la Fin des Temps. En effet, le tétramorphe accompagne les deux anges venus chercher le Christ sur terre.
De part et d'autre du tympan, la luxure et les fondateurs de Charlieu sont représentés.
La Vierge entourée des deux anges
L'encadrement est à l'image du tympan, d'une très grande richesse. L'archivolte interne et ciselée d'une série de palmettes; au dessous, se déploie un large damier et le sommet est couronné par un arc de roses perlées que semble brouter l'Agneau Pascal.
Agneau Pascal surmontant le Grand Tympan.
Le tympan surmontant le petit portail
Ce tympan présente une composition savante. Il mêle également plusieurs thèmes pour en montrer la résonnance symbolique. Il met en scène, dans une composition dynamique, les Noces de Cana. Le traitement est identique à celui de la Cène dont elles sont la préfiguration. Le Christ, placé au centre entre l'époux et l'épouse joue son propre rôle dans sa relation avec l'Eglise. Pour bien montrer l'aspect mystique de ces noces, la table est placée sur un rang d'arcades, maintenue par des piliers évoquant également l'autel d'une église. Par les éléments présents sur la table on peut faire le lien avec la multiplication des pains et des poissons qui préfigurent la Cène.

Les Noces de Cana
Le linteau montre un banquet antique (avec notamment le personnage de droite qui se sert du vin dans un petit tonnelet), ce choix de banquet antique permet de marquer la différence entre orgie et desftin mystique. Sur la voussure, le Christ trône au sommet de l'arc. Il est rrès abimé mais on le reconnait grâce à l'auréole crucifère. Les personnages qui l'entourent sont ceux qui assistent à la Transfiguration ainsi que l'écrit Matthieu (17, 1-13). Elie est à ses pieds, en adoration angélique; Jacques et Jean sont à sa droite, Pierre et Moïse à sa gauche. Sur le corbeau de droite, le Christ romp le pain avec les pélerins d'Emmaüs, geste qui complète ce tableau consacré au partage et à la communion. 

mardi 8 mars 2011

La Marseillaise de Rude

Le Départ des Volontaires. 1833-1836. Haut relief de l'Arc de Triomphe
Place de l'Etoile. Paris
Cette sculpture réalisée par Rude est l'une des plus célèbre du XIXème siècle, elle va forger la renommée de l'artiste et influencer de nombreux artistes contemporains jusqu'aux ruptures du XXème siècle. Cependant, elle a servi de nombreux discours idéologiques bien éloignés des intentions de son créateur tant elle a été utilisée, manipulée et détournée. Mais en retour, elle contribua à façonner l'image de Rude telle que l'historiographie nous l'a léguée, celle d'un chantre de l'épopée révolutionnaire. 
Voulue par la Monarchie de Juillet, le Départ des Volontaires est d'abord un choix politique  renouant avec la Grande Révolution dans l'esprit de juillet 1830. C'est un choix patriotique permettant de satisfaire l'opinion républicaine tout en légitimant la monarchie constitutionnelle, modèle du régime de Louis-Philippe, en insistant sur l'histoire de ses origines. Le Départ, renvoyait à Valmy, première victoire de la France révolutionnaire contre les monarchies coalisées. Louis-Philippe aimait à faire savoir qu'il avait participé à cette bataille fondatrice comme à celle de Jemmapes. Le recours à cette inconographie est donc conforme à son régime. On peut trouver une iconographie commune avec La Liberté Guidant le Peuple de Delacroix (1831) notamment dans le geste du bras tendu représentant politiquement le mouvement, le progrès en amrche. La gestuelle est commune aux 2 oeuvres.
Delacroix. La Liberté Guidant le Peuple. 1831.
Huile sur toile de 260 X 325 cm. Conservée au Louvre
L'analogie avec la scupture de Rude semble d'autant plus fondée puisque les esquisses de Delacroix avaient pour but de glorifier la Grèce insurgée contre la domination turque et représentait une allégorie du peuple prenant les armes pour son indépendance. Cette icinographie d'une femme quasi-divisinée incarnant l'idée de la Nation guidant le peuple se retrouve dans la culture commune de nombreux artistes.
Isidore Pils. Rouget de l'Isle chantant la Marseillaise
757 X 600 cm. Huile sur toile conservée au Musée Historique de Strasbourg
Cette iconographie correspond au même code visuel du bras levé qui signifie l'enthousiasme. C'est une image très diffusée sous la IIIème République, elle devient porteuse de l'emblême de l'hymne national.
La réussite de Rude est de faire correspondre dans la même oeuvre une allégorie de la guerre et un évènement historique de la geste nationale renvoyant à une épopée moderne. Cependant, il n'a pas recours aux vêtements de la Révolution mais garde un mode allégorique. Il crée une sculpture morale dont les modèles sont tirés non plus de l'Antiquité mais de l'histoire moderne tout en combinant l'idéal de la nudité héroïque de l'Antique et le "genre celtique" c'est à dire gaulois. Les types physiques, les costumes et accessoires sont issus de la mode ossianique populaire sous le Consulat. Rude transpose ainsi l'action historique des volontaires de 1792 dans une antiquité gauloise, à la fois nationale et mythique.
Le modèle grec, redécouvert par Lord Elgin inspire également les artistes. Les mouvements sont directement inspirés des sculptures de Phidias au Parthénon.
Reconstitution de la frise est du Parthénon.
Querelle de Poséidon et Athéna
Très rapidement cette sculpture de Rude entre dans l'imaginaire collectif et à chaque situation de péril national, les politiques font appel au Départ des Volontaires pour conjurer les défaites ou soutenir les efforts de guerre.
Raoul Dufy. Les Nations alliées pour le triomphe de la Liberté
La Marseillaise de Rude sert ensuite un tout autre propos politique, elle devient une allégorie du peuple ouvrier sous la plume de Steinlen, la figure féminine lève le bras qu'elle a libéré de ses chaines, elle devient une Marianne du prolétariat.
T. A. Steinlen. La Libératrice
La figure féminine qui possède encore toute sa force, ici est associée à une idéologie de changement social.
Cette image ressurgit au moment de la Grande Guerre et se retrouve sur de nombreuses affiches appelant à l'engagement. Elle sera également utilisée durant la seconde Guerre Mondiale.
Affiche destinée à l'engagement
Conservée au Mémorial de Caen
Cette figure sera également récupérée par les extrèmes-droites qui en font une image idéale de la France.

L'outrance et parfois une certaine forme d'abstraction, ont permis l'utilisation à des fins de propagande dès la fin du XIXème siècle d'une sculpture que son créateur avait voulu le symbole d'une guerre juste. Mais l'exploitation de cette figure populaire permet de découvrir une relecture de l'histoire nationale et introduit l'idée d'une trahison; c'est parce que l'idée de Rude a pu être subvertie et pervertie que son appropriation par la république comporte une tell charge émotive.

lundi 28 février 2011

Vénus et Adonis de Cornelis Van Haarlem

Vénus et Adonis de Cornelis Van Haarlem. 1614
Huile sur toile. 0.94 X 0.74 cm
Conservée au Musée des Beaux Arts de Caen
Cornelis Van Haarlem (1562-1638) est fils de drapier; il nait dans l'une des cités la plus riche et la plus importante des Pays-Bas, sous l'autorité du roi d'Espagne, Philippe II. Après la "tempête iconoclaste" la ville de Haarlem se place sous la protection du Prince d'Orange, Guillaume de Nassau et connait quatre années d'occupation durant lesquelles elle est pillée par les espagnols. Durant ce siège, 1/5ème de la population va périr de privations et 1/3 des édifices sont détruits.
Cornelis est lié de par son père à la caste des riches marchands; son père lui confie afin de préserver ses intérêts économiques, une grande maison patricienne qui est également sous la garde du peintre Pieter Pietersz qui initie le jeune Cornélis au dessin. A l'âge de 17 ans, le jeune peintre part pour la France mais doit rebrousser chemin face à une épidémie de peste, il s'installe à Anvers où il devient l'élève du peintre Coignet. Durant ce séjour, il apprend à manier particulièrement les couleurs et les clairs obscurs grâce à la formation que Coignet a eu en Italie. Cornelis retourne ensuite à Haarlem en 1581 et trouve une ville exangue après le départ des espagnols, mais qui va connaître un regain d'activité et de richesse grâce à l'industrie du drap. C'est dans ce climat de renouveau économique et social que la cité de Haarlem va renouer avec sa tradition humaniste et artistique notamment par le biais de l'estampe et par le retour de peintres ayant séjourné en Italie. De nombreux peintres fondent "l'Académie de Peinture de Haarlem" qui fonctionne plus comme un cercle d'amis échangeant des techniques et des savoirs-faires. Van Haarlem se révèle porteur de talents et voit les premières commandes arriver notamment pour la milice de la ville. Cornelis est un travailleur acherné mettant sans cesse en pratique les techniques apprises et il réalise de grandes compositions pleines de vigueur.

Van Haarlem. La Chute de Lucifer. 1588. Conservé à Copenhague

Dans ce tableau, les corps nus envahissent l'espace dans d'étranges contorsions. Les poses outrées, la mise en scène singulière, les excentricités anatomiques, les chairs boursouflées se déchainent dans un maniérisme porté à un très haut niveau. Le caractère vivant est donné par une gestuelle expressive, et la diversité des attitudes.

Vénus et Adonis. Détail

En ce qui concerne le tableau Vénus et Adonis datant de 1614, il s'insère dans un style particulier très populaire aux Pays Bas au XVIIème siècle, le tableau évoquant le départ pour la chasse.

Le mythe d'Adonis : Vénus s'éprend d'Adonis et devient sa compagne de chasse; elle l'avertit des dangers auxquels il s'expose ("ne va pas attaquer à des animaux à qui la nature a donné des armes" selon Ovide dans les Métamorphoses) mais Adonis néglige ces conseils et il est tué par un sanglier. Vénus, trouvant le corps privé de vie d'Adonis, verse du nectar sur son sang et fait naitre une fleur. Ce thème réunit tous les éléments susceptibles d'enflammer l'imagination des artistes : l'amour, la beauté, la jeunesse, la mort tragique et le merveilleux. Mais plus que la scène finale, les peintres vont s'attacher à représenter le jeune héros au repos auprès de la déesse comme le fait Cornélis Van Haarlem. Cependant, dans l'imaginaire du XVIIème siècle, cette image prend un aspect édifiant, celle du jeune écervelé qui faisant fi des conseils, renonce à l'émour divin se tourne vers des plaisirs terrestres immédiats.

dimanche 20 février 2011

Les scènes de Marché

ieter Aertsen. Scène de Marché. Non daté

Huile sur bois; 127 X 85 cm. Conservé au Musée de Cologne

Les scènes de marché sont les indicateurs d'une époque fortement marquée par des bouleversements économiques importants. Elles témoignent d'une conscience des valeurs modifiées et d'un grand intérêt porté à de nouveaux biens fabriqués dans de nouvelles conditions. Les Pays-Bas sont la région où cette modification est le plus visible. Ils faisaient partie de l'immense empire de Charles Quint mais en raison de leur développement économique, mais étaient depuis très longtemps des centres de haute production. Organisés depuis très longtemps (XIIIème siècle) en corporations, les régions des Flandres, du Brabant, de Gand, Louvain, Bruxelles... développent les premières manufactures au XIVème siècle. L'artisanat corporatif disparait peu à peu au profit de ces manufactures qui assurent sur le marché la présence de produits en croissance constante et continue. Au XVIème siècle, on assiste à l'avènement du port d'Anvers et à son port qui devient un immense centre de commerce et favorise l'installation de comptoirs.

Le domaine agricole connait également de grands bouleversements. De nombreux riches citadins rachètent des propriétés rurales à des nobles appauvris qui n'exploitaient plus leurs terres mais se contentaient de vivre de leurs rentes. Ils insufflent de grandes quantités d'argent et de nouvelles méthodes de production. L'Europe connait également à cette période un accroissement important de la population qui demande une grande production alimentaire. Ces nouvelles manières de produire sont à l'origine de bouleversements politiques qui voit la disparition progressive du système féodal.

Pieter Aertsen. Le Christ et la Femme adultère. 1559. Huile sur bois
122 X 177 cm. Conservé au Kunstinstitut de Francfort

Fêtant la nouvelle richesse, le peintre Pieter Aersten, originaire d'Amsterdam qui séjourna à Anvers, composa de nombreuses scènes de marché qui acquirent chez lui une dominance propre à repousser le sacral à l'arrière plan. Dans Le Christ et la Femme Adultère, l'action biblique a été repoussée à gauche au fond du tableau tandis que le premier plan célèbre le marché et ses produits offerts.

Le Christ et la femme adultère, scène biblique du fond.

Ce qui est étrange, c'est le mélange des différentes époques, : une scène biblique avec costumes antiques, et une situation actuelle avec des paysans en costumes contemporains avec leurs marchandises. Aertsen avait déjà réalisé ce type de mise en scène avec son tableau Ecce Homo vers 1550.

Pieter Aersten. Ecce Homo. vers 1550. Huile sur bois

59,5 X 122,5 cm. Conservé à Munich à la Alte Pinakothek

Ici aussi, le peintre offre la priorité à la séquence de type parabolique représentant des étalages et des chariots portant des provisions. Pendant longtemps, ce type de mélange dans les scènes a été mis sur le compte du maniérisme, il faut y voir en réalité une forte référence aux bouleversements économiques et sociaux qui se mettent en place. On assiste même à une fétichisation de l'objet, dans une société désenchantée par la religion, le moment où la marchandise gagne un certain rayonnement et il semble presque s'en dégager un effet magique. Ce déballement de marchandises permet également de faire des effets picturaux, des étalages de formes, de couleurs, de textures qui semblent ravir les peintres. Ces tableaux sont aussi de vives critiques aux prémices d'une société de consommation dans la mesure où ces marchandises ne sont pas à la portée de tous, elles stimulent les convoitises et accentuent des besoins artificiels reléguant la vie spirituelle éternelle à un arrière plan au profit d'une vie matérielle qui ne satisfait que des envies immédiates.